In memoriam Mgr Jean Zizioulas (1931-2023)

Ce jeudi 2 février nous avons appris avec tristesse le départ vers Dieu du métropolite majeur de Pergame Jean (Zizioulas) à Athènes, alors qu’il se trouvait hospitalisé depuis quelques jours pour des soucis de santé. Il avait 92 ans. Reconnu comme l’un des théologiens orthodoxes les plus féconds de notre époque, il se considérait comme disciple de notre ancien professeur le père Georges Florovsky.

Né en 1931 au village de Katafygion, près de Kozani en Macédoine, il a commencé ses études à la Faculté de théologie de l’université de Thessalonique pendant deux ans, puis à la Faculté de théologie de l’université d’Athènes, dont il est sorti diplômé en 1955. Après avoir terminé ses études de troisième cycle à l’Université de Harvard (USA) auprès de notre ancien professeur le père Georges Florovsky, il a présenté en 1966 sa thèse de doctorat à l’université d’Athènes, intitulée : « L’unité de l’Église dans la Divine Eucharistie et dans l’évêque durant les trois premiers siècles », recevant le doctorat en théologie avec la mention « excellent ».

Rapidement engagé dans le mouvement œcuménique (au sein de la commission « Foi et Constitution »), il a enseigné au séminaire Saint-Vladimir, à New York (1961-1963), puis au Collège hellénique de la Sainte-Croix, à Boston (1963-1964) ; puis, des années 1970 au milieu des années 1990, il a enseigné la théologie dogmatique à l’université d’Édimbourg, a été professeur de théologie systématique à l’université de Glasgow puis au King’s College de Londres, achevant sa carrière comme professeur titulaire de théologie dogmatique à l’université de Thessalonique (1998). Il a également été professeur invité aux universités de Londres, de Genève et à l’université grégorienne de Rome, ainsi que professeur honoraire de la faculté de théologie de l’université d’Athènes. Il a été invité à donner des conférences dans de nombreuses universités étrangères et est intervenu le 1er novembre 1993 lors du VIIIe Congrès orthodoxe en Europe occidentale qui avait réuni 700 personnes à Blankenberge (Belgique). Il a participé à de nombreuses conférences scientifiques internationales et a représenté le Patriarcat œcuménique durant de nombreuses années dans des organisations internationales, notamment pour la protection de la nature.

En 1986, il a été élu par le saint-synode du Patriarcat œcuménique comme métropolite de Pergame ; il a été directeur du Bureau de la représentation du Patriarcat œcuménique à Athènes de sa fondation (2000) jusqu’en 2014, année où il a été élevé au rang de métropolite majeur. C’est lui qui a présidé les IVe et Ve conférences panorthodoxes préconciliaires de Chambésy (Suisse). Actif toute sa vie dans le mouvement œcuménique, il a été membre du Comité central du Conseil œcuménique des Églises, et a été longtemps coprésident orthodoxe de la Commission internationale du dialogue théologique officiel entre orthodoxes et catholiques romains, et de la Commission similaire du dialogue théologique entre orthodoxes et anglicans.

Auteur de nombreuses livres et articles en plusieurs langues, qui font désormais autorité dans les domaines de la théologie et de l’ecclésiologie orthodoxe et qui ont une audience œcuménique, Mgr Jean était membre de l’Académie internationale des sciences religieuses (Bruxelles) et avait reçu le doctorat honoris causa non seulement de notre Institut Saint-Serge et de la Faculté de théologie de l’Institut catholique de Paris, mais aussi de la Faculté de théologie orthodoxe de Belgrade, de l’Université de Cluj-Napoca, et des Universités de Münster et de Munich en Allemagne. Reçu en 1993 comme membre permanent de l’Académie d’Athènes, il en a été élu président en 2002. Le président de la République hellénique lui avait décerné en 2003 la dignité de grand officier de l’ordre du Phénix pour sa contribution à la science, la culture et la société.

Nul doute que le métropolite Jean de Pergame apparaît dans l’Eglise orthodoxe universelle comme une figure théologique majeure dont les travaux continueront de nourrir pour longtemps, au-delà de l’espace orthodoxe, la réflexion théologique chrétienne dans son ensemble. Les principaux axes de son œuvre sont l’interprétation existentielle de la doctrine trinitaire et ses implications, la théologie de la personne humaine, l’ecclésiologie eucharistique, l’ontologie eschatologique, etc. Il a su en outre entretenir un véritable dialogue entre les données de la foi ecclésiale et la culture du monde contemporain.

La venue de Monseigneur Jean à l’Institut Saint-Serge lors de la séance solennelle du dimanche 10 février 2008 pour la remise de son doctorat honoris causa fut un grand moment. Nous reproduisons ci-après le discours de la laudatioprononcé à cette occasion et l’allocution du récipiendaire intitulé « L’apport de la théologie orthodoxe occidentale ».

Au terme d’une vie toute consacrée à l’Église et à la théologie, on ne pourra s’empêcher de voir un signe dans le fait que le métropolite Jean ait rendu son âme à Dieu le jour de la fête de la Présentation du Seigneur au Temple : Nunc dimittis

Que sa mémoire soit éternelle !

Michel Stavrou,
Doyen de l’ITO Saint-Serge

Pour lire le discours de la laudatio prononcé par M. Michel Stavrou et l’allocution du métropolite Jean Zizioulas, cliquez ici