Message de Noël du Doyen

Paris, le 18 décembre 2022

Chers étudiants, chers amis de l’Institut Saint-Serge,

Alors que nous approchons de la fête de Noël, célébration de la Nativité du Sauveur, comme il y a deux mille ans les forces obscures s’agitent dans le monde. La guerre aux portes de l’Europe occidentale, qui aura marqué l’année, s’intensifie avec son cortège d’innombrables victimes. Les menaces qui croissent à l’horizon font craindre un embrasement général. Nous avons besoin de la lumière de la Vérité et de la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence.

Reprenons une des grandes antiennes O de l’Avent, issues du rite romain et qui, au vie siècle, étaient chantées par les fidèles pour se préparer à la fête de Noël : « O Orient, splendeur de la lumière éternelle et soleil de justice : Viens, Seigneur, illuminer ceux qui habitent les ténèbres et l’ombre de la mort ! »

Comme l’a dit Alexandre Soljénitsyne : « Les nations sont la richesse de l’humanité, sa personnalité collective ; chacune d’entre elles, même la plus petite, a sa propre couleur et contient en elle une facette de la volonté de Dieu. » Cependant, plus précieuse que la diversité nationale, l’unité dans la foi orthodoxe nous oblige. Il est de notre responsabilité, chacun à son modeste niveau, de travailler à valoriser et manifester cette unité ecclésiale, surtout dans le laboratoire de la « diaspora » orthodoxe, là où les conflits juridictionnels et politico-ecclésiastiques la mettent en péril. Cette unité ne peut advenir qu’en recevant et cultivant la paix répandue par Celui qui a bien voulu partager notre humanité, pour la renouveler de l’intérieur et nous faire accéder à la vie divine. Que chantent les puissances célestes apparues aux bergers de Bethléem venus visiter l’Enfant-Dieu ? « Paix sur la terre et bienveillance parmi les hommes ! » (Lc 2,14).

Déjà au xive siècle voici ce que saint Grégoire Palamas prêchait pour la fête de Noël à ses fidèles de Thessalonique, victimes de la cruelle guerre civile qui ravageait l’Empire byzantin :

« Cette paix, gardons-la avec nous de toute notre force : car nous l’avons reçue comme un héritage de Celui qui a été enfanté, notre Sauveur, et qui nous a donné l’Esprit d’adoption par lequel nous sommes devenus héritiers de Dieu, cohéritiers du Christ (Rm 8,17). Soyons donc en paix avec Dieu en accomplissant les œuvres qui Lui sont agréables : vivre de façon intègre, dire la vérité, agir avec droiture […] en célébrant le Seigneur dans nos cœurs. Soyons en paix avec nous-mêmes en soumettant la chair à l’esprit, en choisissant de vivre accordés à notre conscience, et en mouvant le monde intérieur de nos pensées avec mesure et saintement. C’est ainsi que nous mettrons fin à la véritable guerre civile, celle qui a lieu en nous-mêmes. »

Les choses n’ont guère changé en sept siècles. Homme de prière et de paix, le patriarche Paul de Serbie, écrivait il y a vingt ans : « Nous serons tous pris dans les glacis de la discorde et de l’intolérance si nous ne faisons pas entrer dans nos cœurs le Christ qui est le seul capable de réunir ceux qui sont divisés, de réconcilier ceux qui se sont disputés, de réchauffer nos cœurs et d’apporter la paix dans nos existences. »

Que Celui qui a accepté de naître dans une humble crèche d’animaux, puis d’être plongé dans les eaux du Jourdain, nous envoie l’Esprit Saint pour rouler la pierre qui ferme nos cœurs et nous débarrasser des scories qui nous aveuglent !

Au nom de tous mes collègues, je vous présente nos vœux chaleureux de paix, d’espérance et de joie pour les fêtes de Noël, de la Théophanie et la Nouvelle Année.

Michel Stavrou,
Doyen