In memoriam Mgr Kallistos Ware (1934-2022)

Ami fidèle de l’Institut Saint-Serge, le métropolite Kallistos (Ware) s’est endormi dans le Seigneur le 24 août 2022, à l’âge de 87 ans.

Né Timothy Ware le 11 septembre 1934 en Angleterre, à Bath (Somerset), il avait été élevé dans l’Église anglicane. Son instruction s’est déroulée à la Westminster School (Londres) et au Magdalen College de l’Université d’Oxford, où il a obtenu une double maîtrise en Langues classiques (Classics) et en Théologie. Il a également fait des études de lettres classiques à l’Université américaine de Princeton.

En 1958, à de 24 ans, il devient membre de l’Église orthodoxe. Il voyage ensuite en Grèce, séjournant longtemps au Monastère Saint-Jean-le-Théologien de Patmos. Il a également fréquenté d’autres lieux importants de l’Orthodoxie comme Jérusalem et le Mont Athos. Alors qu’il était encore laïc, il a passé 6 mois au Canada dans un monastère de l’Église orthodoxe russe. En 1964 paraît la 1re édition de son célèbre livre L’Église orthodoxe.

En 1966, il est ordonné prêtre au sein du Patriarcat œcuménique et est tonsuré moine sous le nom de Kallistos. La même année, il devient conférencier en études orthodoxes à l’Université d’Oxford, poste qu’il occupera pendant 35 ans jusqu’à sa retraite en 2001. En 1970, il est nommé Fellow au Pembroke College à Oxford.

En juin 1982, il est élu et consacré évêque auxiliaire avec le titre d’« évêque de Diokleia », recevant la tâche d’assister dans ses fonctions l’évêque de l’archidiocèse de Thyatire et de Grande-Bretagne (Patriarcat œcuménique). Dans son premier sermon en tant qu’évêque, il suggéra que la diversité des vies de saints révèle que chacun de nous est un chemin unique vers le salut. Dans ses homélies hebdomadaires, il mettait l’accent sur la puissance du nom de Jésus, l’appel à la conscience de soi, l’attente des épreuves et la primauté de l’action de grâce. Il soulignait que la prière est une offrande de gloire, plutôt qu’une liste de plaintes.

Malgré sa consécration épiscopale, Mgr Kallistos poursuivit une vie simple à Oxford avec ses deux tâches de pasteur de la communauté grecque orthodoxe locale et de conférencier à l’Université. Nombreux sont ceux qui, en séjour à Oxford, ont pu jouir de son accueil chaleureux et de son hospitalité. Depuis sa retraite en 2001, il continuait à publier et à donner des conférences sur l’Orthodoxie. Jusqu’à récemment, il présidait le directoire de l’Institute for Orthodox Christian Studies de Cambridge. Il a été longtemps président du groupe des Amis de l’Orthodoxie de l’île de Iona et des Amis du Mont Athos. Le 30 mars 2007, le saint-synode du Patriarcat œcuménique a élevé le Diocèse de Diokleia au rang de métropole et Mgr Kallistos a reçu le titre de Métropolite de Diokleia.

Mgr Kallistos était non seulement un père spirituel, mais aussi un grand pédagogue, un conférencier extraordinaire et un authentique théologien, soulignant la dimension priante et spirituelle de toute quête théologique en perspective orthodoxe. Il a écrit ou édité plus d’une douzaine de livres, de nombreux articles dans un large éventail de revues (notamment la revue de théologie orthodoxe Contacts), et des essais dans des livres sur de nombreux sujets, tout en fournissant des préfaces, des avant-propos ou des introductions à de nombreux ouvrages. Il est surtout connu par son ouvrage de synthèse L’Église orthodoxe, publié alors qu’il était encore laïc en 1963 et révisé en 1993, l’une des meilleures introductions à l’orthodoxie. En 1979, il a publié un volume complémentaire, The Orthodox Way. Il a dirigé la traduction et la publication de nombreux textes ascétiques et liturgiques orthodoxes, notamment la Philocalie, avec la collaboration de G. Palmer et de P. Sherrard. Il est venu régulièrement en France pour des rencontres et des conférences, que ce soit à l’Institut saint-Serge ou dans le cadre de congrès de la Fraternité orthodoxe en Europe occidentale.

Homme irénique d’une grande ouverture d’esprit, Mgr Kallistos était engagé dans de nombreux dialogues, notamment entre orthodoxes de différentes traditions. Parmi ses engagements œcuméniques, il était membre de la Commission de dialogue théologique international anglican-orthodoxe et, en 2017, il s’était vu décerner la croix de Lambeth pour l’œcuménisme par l’archevêque de Canterbury pour sa contribution exceptionnelle au dialogue. C’était un membre enthousiaste du Fellowship Saint-Alban-et-saint-Serge, fondé en 1928 pour favoriser la compréhension mutuelle entre anglicans et orthodoxes.

Doué d’un rare humour, Mgr Kallistos racontait souvent une histoire dans laquelle il déclarait s’être endormi à l’église pendant un sermon et réveillé en découvrant qu’il était lui-même le prédicateur. Il aura été une figure majeure non seulement de l’Église orthodoxe, mais plus largement du christianisme anglophone. Le Conseil œcuménique des Églises salue sa mémoire comme celle d’« un hiérarque exceptionnel du Patriarcat œcuménique, l’un des principaux théologiens actuels du monde orthodoxe, auteur prolifique, enseignant profondément respecté par ses nombreux disciples dans le monde entier ».

Que sa mémoire soit éternelle !

Michel Stavrou, Doyen de l’ITO Saint-Serge

 

Pour mieux connaître la vie et l’œuvre de Mgr Kallistos, voir ce bref reportage en anglais :